[a] Un terme développé par le philosophe Jeremy BENTHAM dans l’Introduction aux principes de la morale et de la législation en 1789, où il désigne les animaux comme des êtres « sentients », c’est-à-dire des êtres ayant la capacité de ressentir des émotions.

[b] LORENZ Konrad, L’Agression : une histoire naturelle du mal (1976), Espagne, Flammarion, 2018, p. 71.

[c] PAILLASSA Pauline, « Visualisez le nombre d'attaques de loups et leur localisation en France depuis 2010 », in franceinfos:, 19 septembre 2024, en ligne, consulté le 28 décembre 2024, [https://www.francetvinfo.fr].

[d] HOLMES John, « Chaque jour, 25 000 personnes meurent de faim », in ONU, 2008, en ligne, consulté le 23 décembre 2024, [https://www.un.org].

[e] Une zoonose est une maladie humaine transmise par l’animal.

[f] DEBOVE Laurie, « Nous sommes la dernière génération à pouvoir protéger le vivant », in VIVANT, La Relève de La Peste, 2019, p.175.

[g] Cette étude est réalisée en mai 2019 par le Think Tank Australien Breakthrough-National Centre for Climate Restoration.

Les points de vue divergent quant aux comportements futurs que l’humain doit adopter avec les animaux. Dans les fictions de fin du monde, étudiées au sein de ce chapitre, l’espoir semble vain. L'effondrement de la civilisation est inéluctable et l’animal ne constitue pas une priorité dans notre chute.


Un monde anthropocentré

Même si les animaux sont des êtres « sentients [a] », devons-nous pour autant arrêter de les tuer pour nous nourrir ? Dans son ouvrage L’Agression, le biologiste et zoologiste Konrad LORENZ souligne le fait que les comportements agressifs n’ont rien de profondément mauvais. Il s’agit là souvent d’un « instinct [b] » pour la survie des espèces. En effet, l’animal est lui-même capable d’agression que ce soit avec son espèce, les autres espèces et l’être humain. Par exemple, dans le film fictif Cujo [25], un saint-bernard est mordu par une chauve-souris qui lui transmet la rage. Le chien de compagnie devient alors fou et s’en prend à sa famille humaine. De surcroît, les animaux se nourrissent d’autres animaux : les loups carnivores tuent d’autres espèces pour se sustenter. En 2022, le loup a fait onze mille six cent seize victimes parmi le bétail des éleveurs français [c]. Pourquoi alors l’être humain devrait-il faire exception ? Selon l'Organisation Mondiale des Nations Unies « chaque jour, vingt-cing mille personnes meurent de faim [d] ». En quoi le bien-être animal devrait être une priorité, lorsque nous ne parvenons pas encore à atteindre des conditions de vie humaines optimales pour tous ? D’autant plus que les animaux peuvent être la source de nos malheurs, à l’image des zoonoses [e]. Dans L’Île aux chiens [40] le réalisateur Wes ANDERSON imagine un futur fait de figurines enfantines où il exclut le chien de la civilisation. Ce choix drastique est effectué afin de protéger l’humain d’une épidémie de grippe canine. Les animaux sont alors livrés à eux-mêmes.


Un monde sans animaux

« Et tout Être est agonie flamboyante comme une vision apocalyptique de la guerre prochaine. » Il s’agit de la phrase écrite au dos d’un tableau de l’artiste Franz MARC intitulé Le Destin des animaux [17]. Contrairement à ses premières peintures qui représentent l’harmonie, cette peinture (réalisée en 1913) incarne l’angoisse d’un monde au bord du gouffre. Le tableau comprend alors des figures animales géométriques qui se disloquent dans un environnement entièrement diffracté. Les biches tendues vers le ciel sont écartelées par des éclairs rouges. Cette peinture est non seulement l'incarnation de l’inquiétude d’une guerre imminente (la Première Guerre mondiale), mais aussi la prédiction d’une planète qui se porte de plus en plus mal. Aujourd’hui, les rapports scientifiques ne cessent de compter nos pertes. Afin de recenser les résultats de l’hécatombe du vivant, L’IUCN (Union International pour la Conservation de la Nature) a notamment mis en place la Red List [46]. Il s’agit de la liste rouge des espèces menacées dont le nombre d’espèces éligibles ne cessent de s’accroître : entre 2000 et 2019 le nombre a été multiplié par trois (passant d'environ dix mille à trente mille). Les espèces menacées sont classées par couleur en fonction du degré de menace portant sur leurs espèces : les plus menacées sont dans des teintes proches du noir, du violet ou du rouge, tandis que les moins menacées sont dans des teintes de verts ou de gris. Cette gamme colorimétrique permet de rendre plus impactant la représentation des graphiques chiffrant l’évolution des espèces menacées au sein d’une même espèce. Ainsi, pour la rédactrice en chef de La Relève de La Peste, Laurie DEBOVE, l’être humain doit faire face à « un constat sans appel : nous vivons dans la sixième extinction de masse [f]. » Par ailleurs, une étude scientifique australienne prévoit la fin du monde en 2050 [g] si nos modes de vies n’évoluent pas. N’est-il pas alors absurde de lutter contre la souffrance animale dans un monde où tout finira par s’écrouler. D’autant plus que l’animal pourrait nous survivre en cas de fin du monde, il n’a peut-être nullement besoin de l’humain pour le sauver. Dans l’épisode 3 Robots [41] de la série d’anthologie Love Death and Robots, il est envisagé que les chats puissent survivre à l’apocalypse contrairement aux humains réduit à l’état de squelette sans vie.