[a] THOUY Hélène, RENAN Laure, Sauver les animaux et nous sauver nous-mêmes, Lormont, Le bord de l'eau, 2022, p. 140.

[b] AÏT-TOUATI et al., « Jean-Paul Engélibert — La fiction et l’effondrement qui vient », in Énergie et désespoir. Un monde à réparer, Paris, éditions deux-cent-cinq, 2021, p. T47-48.

[c] C’est une étude réalisée par une équipe de plus de deux-cents chercheurs au Centre de recherches mathématiques portée par Guillaume BOURQUE (concepteur d’un algorithme permettant de comparer entre elles des sections de chromosomes d’espèces différentes) en 2004 et publiée par l’Université de Montréal.

[d] LERAY Éva, « Pourquoi rats et souris sont-ils les “ stars “ des expérimentations en laboratoire », in Ouest France, en ligne, consulté le 2 janvier 2025, [https://www.ouest-france.fr].

[e] PELLUCHON Corine, Réparons le monde. Humains, animaux, nature, Paris, éditions Payot & Rivages, 2020, p. 50.

Selon le Parti animaliste français, « sauver les animaux, ce serait une manière de nous sauver nous-mêmes [a] », pareil à une forme de rédemption. Si l’avenir de la civilisation humaine semble incertain, des fictions prospectives nous redonnent de l’espoir. En ce sens, les scénarios futurs sont envisagés où humains et non-humains pourraient vivre ensemble dans un monde meilleur ou peut-être même parfait.


Un monde meilleur

Depuis 1947, chaque année des scientifiques du Bulletin of the atomic Scientists actualisent l’Horloge de l’apocalypse. En 1972, nous étions à douze minutes de la fin du monde avant minuit, alors qu’en janvier 2024, nous étions à quatre-vingt-dix secondes. Ce temps est calculé à l’échelle de l’histoire de l’humanité à partir de données de l’actualité. Cependant, le spécialiste de la fiction apocalyptique, Jean-Paul ENGÉLIBERT, rappelle que ces prévisions écologiques sont bâties sur des données du présent, elles constituent entre autres des « récits de l’avenir [b]». Par conséquent, il est encore possible d’imaginer un monde meilleur. D’autant plus que face aux constats écologiques alarmants des humains continuent de lutter. Dans l'édition Bestiaire d'éco-sabotage [70], le designer graphique Geoffrey DORNE répertorie toutes ces actions de résistances. Chaque action est illustrée par des créatures qui incarnent les symboles d’une lutte nouvelle et contemporaine. Il s'inspire des bestiaires du Moyen Âge (entre créatures mystérieuses et familières). Il y a par exemple une action effectuée en mars 2022, par huit militants qui bloquent un train de céréales destiné à l’élevage hors-sol. Leur objectif est de dénoncer les dérives de l’agro-industrie en Bretagne et l'impact de l’élevage intensif sur l'environnement. Plus qu’un symbole, l'animal pourrait lui-même être le guide de ce monde meilleur. Dans le jeu vidéo Humanity [59], un shiba d’une lumière radieuse indique la voie à une foule amorphe d’humains. Le créateur de ce puzzle-game, Anthony JAUNEAUD emploie une esthétique brutaliste pour représenter les humains devenant une masse d’êtres dénués d’intelligence. En revanche, le chien est lui érigé en sauveur de l’humanité par une imagerie céleste.


Un monde en harmonie

En 1797, Johann KASPAR LAVATER grave en couleur L’Évolution de la tête d’une grenouille jusqu’à celle d’un homme primitif [11]. Ce pasteur s'était intéressé à l’étude de la physionomie, autrement dit l’observation physique d’une personne visant à connaître sa personnalité. Il propose dans cette succession de portraits une analogie entre l’homme et l’animal. Peu à peu, le visage de la grenouille mute pour devenir celui de l'homme. De cette façon, l’humain est le descendant de la grenouille. En effet, l’humain est un animal. Nous possédons par exemple 90 % de gènes communs avec le rat [c]. Par ailleurs, c’est pour cette raison que les rats et les souris sont les plus utilisés lors des expérimentations dans les laboratoires français : en 2021 sur un millions neuf cents mille animaux 70 % étaient des rats ou des souris [d]. Cette ressemblance entre les animaux et les humains est mise en exergue par le scénario d’anticipation de l’épisode animé La Ferme de Mason [54]. Un fermier déclare la guerre à des rats envahissant sa grange. Pour ce faire, il achète des robots qui massacrent les bêtes. Lorsque le fermier voit les rats lutter pour survivre contre la machine infernale, il se voit en tant que soldat pendant la guerre. Dès lors, il change alors de camp et combat aux côtés des animaux. Ainsi, cet épisode est un écho de la « zoopolitique [e] », où s’est formée l’idée que nous appartenons à une communauté du vivant incluant les humains et non-humains. Dans la religion chrétienne, Adam et Ève dans le jardin d’Éden [12] incarne la représentation d’un paradis possible où humains et animaux vivent en harmonie dans une nature sublime. Se pourrait-il qu’un jour nous parvenions à façonner un tel lieu ?